Psychiatre et Psychothérapeute
Brief info
Quand j’ai commencé à m’intéresser à l’étrange, à ce qui se passe au sein du psychisme et de la folie pour devenir psychiatre – psychothérapeute et psychanalyste, j’avais déjà fait la connaissance de l’étranger. En effet, j’avais commencé mon parcours médical comme médecin généraliste dans un petit hôpital algérien, à soigner des malades qui parlaient surtout arabe ou berbère. Je leur dois beaucoup car ils m’ont aidé à forger mon identité médicale. J’ai aussi
compris à ce moment-là de l’intérieur que la médecine était universelle.
Par la suite, de retour en Suisse, devenu médecin responsable d’un petit centre de crise psychiatrique, je me suis rendu compte qu’il fallait absolument développer des outils spécifiques pour traiter mieux les patient.e.s migrant.e.s. Avec des cliniciens de tous bords, nous avons considéré que le champ de l’ethnopsychiatrie et de l’ethnopsychanalyse devait être développé dans les services de soins psychiatriques mais aussi dans toutes les disciplines médicales et les hôpitaux généraux.
Parallèlement, je pouvais constater, comme tout le monde, que l’accueil des migrant.e.s se durcissait au niveau politique et qu’il fallait aussi agir à ce niveau-là. Ma femme, Graziella, m’avait montré la voie en militant sans relâche dans le champ de l’asile pour la reconnaissance des droits et l’aide concrète aux migrant.e.s. Une de mes filles, Giada, suivait le mouvement dans ses études d’ethnologie et en rédigeant, sur le terrain de la migration, une thèse consacrée
à « l’illégalité régulière », décrivant la situation paradoxale, fabriquée par un système subtilement rejetant, propre à rendre malades celles et ceux qui avaient déjà subi les retombées d’histoires traumatiques qui les avaient conduit.e.s en Suisse.
Dès lors, je ne peux que m’associer profondément à une action, menée par des médecins, qui sont bien placés pour observer et dénoncer les conditions dramatiques qui non seulement peuvent conduire à des soins de moins bonne qualité pour les migrant.e.s mais aussi, encore plus gravement et contrairement à tous les principes éthiques et règlements internationaux, peuvent induire des maladies, psychiques en tout cas. Bien entendu, les médecins ne sont pas les seuls à dénoncer ces situations et à tenter d’y trouver remède. Il est cependant important que nous le fassions aussi en mettant à disposition des autorités les connaissances et l’engagement humanitaire qui sont les nôtres.